Rêve de patchwork

Pour s’encourager

Les origines du patchwork sont très anciennes. Les techniques du Proche-Orient, ramenées  par les croisés, ont donné naissance au trapunto sicilien et au boutis provençal. Le boro vient lui du Japon. Notre imaginaire relie, cependant, immanquablement le patchwork à l’histoire des États-Unis où il est  emblématique. Dans les années 1970, les Françaises et les Européennes ont découvert avec délice le patchwork made in US. Les groupes de quilteuses sont maintenant très actifs. Il faut dire que les couturières en viennent assez vite au patchwork. Il leur reste toujours, en effet,  de jolies chutes de tissus dont elles ne savent pas trop quoi faire. Pour ma part, j’en suis là. Bien sûr, j’ai déjà mené à bien un ou deux projets de patchwork, un sac à livre, un boudin de porte, des travaux bien modestes qui ne nécessitent pas une grande expérience. J’ai en tête une couverture de bébé. J’ai rassemblé depuis deux mois le matériel ainsi que le tissu nécessaires à sa création et, pourtant, je ne me lance pas. La rédaction de cet article va peut-être m’aider à franchir le pas, tout en me faisant comprendre ce qu’est exactement le patchwork. Autant que vous en profitiez !

Un engouement venu d’Amérique

Du XVIIe au XIXe siècles, les colons britanniques et européens importent la pratique du patchwork (en fait du quilt) aux États-Unis. Parmi ces colons, on compte des Quakers et des Amish. Le tissu est alors rare et cher.  Les femmes amish sont très vite intéressées par ce mode de récupération qui correspond à leurs principes de vie. Le patchwork  (ou travail de pièces) permet, en effet, d’utiliser au mieux restes de tissus et vieux textiles. Les patchworks piécés (les morceaux sont cousus entre eux) des Amish sont réalisés avec des tissus unis et contrastés, avec une prédilection pour le noir. Les Quakers, quant à eux, sont connus pour leur participation active aux mouvements de réforme sociale et leurs femmes sont intégrées dans la société. Leurs quilts sont donc moins caractéristiques que ceux des Amish. Ils sont souvent montés à la manière anglaise (english paper piecing), où chaque pièce de tissu est préparée sur un gabarit en papier. Ils peuvent être appliqués, différentes pièces de tissus sont alors superposées.

Le patchwork connaît un véritable essor en Amérique. Chaque foyer se doit de posséder au moins un quilt. Les morceaux de différents tissus, après avoir été découpés en forme de carré, de triangle, ou d’hexagone, sont combinés afin de former un bloc, l’unité de base du patchwork traditionnel.  Il existe de nombreux blocs, entre autres la patte d’ours, l’échelle de Jacob, l’étoile de l’Ohio, le panier, le manteau de Joseph, la cabane de rondins, le vol d’oies sauvages, le chemin de l’ivrogne, la chaîne irlandaise. Les symboles sur les quilts sont des marqueurs d’identité familiale.  Les couvertures les plus belles servent de monnaie d’échange et sont transmises en héritage.

La dernière fugitive de Tracy Chevalier

Nous allons revenir avec ce livre aux Quakers. Tracy Chevalier est une autrice bien connue pour ses romans qui mêlent la fiction à l’histoire, tout en s’intéressant à différentes techniques artisanales ou artistiques : la peinture (La jeune fille à la perle), la broderie (La brodeuse de Winchester), la tapisserie (La dame à la licorne), le travail du verre (La fileuse de verre)The last runaway (La dernière fugitive), paru en 2013, s’intéresse au quilt.

Ce roman raconte l’histoire d’une jeune quaker, Honor, qui quitte l’Angleterre pour s’installer dans l’Ohio. L’histoire se situe au milieu du XIXe siècle. Honor est  bonne couturière et  se fait remarquer dans sa nouvelle communauté par ses points parfaitement réguliers et son aptitude à se servir des deux mains lors du matelassage. Tracy Chevalier raconte une fête du quilt où la jeune femme est chargée de piquer les appliqués de fruits (dans des coupes) et de fleurs (dans des vases), un motif, aux dominantes rouges et vertes, très répandu dans l’Ohio.  Lors de ces fêtes, les femmes quakers travaillent à la même courtepointe qu’elles peuvent terminer en une journée. Honor se marie avec un jeune fermier. Sensible à la misère des esclaves, elle découvre l’existence d’un « chemin de fer clandestin », en fait un réseau de routes secrètes, que suivent les esclaves en fuite pour rejoindre le Canada. Et bien sûr, elle les aide.

Patchwork ou quilt ?

Une des difficultés du patchwork, c’est la vocabulaire anglo-saxon souvent utilisé. Il convient de connaître la signification de certains mots. J’ai dû me renseigner récemment sur la signification de sampler et j’ai fini par comprendre qu’il s’agit d’un quilt qui présente un échantillonnage de blocs différents. Citons encore backing (doublure, dos), square (carré), ou template (gabarit). Ce qu’il faut surtout saisir c’est la différence essentielle entre patchwork et quilt (qui vient de l’anglais quilting, piquage). En France, on confond souvent les deux, ce qui est une erreur aux yeux des Américains. Le quilt est un assemblage de trois couches de tissus (patchwork, molleton et doublure) cousues ensembles avec un fil qui forme des motifs. On peut faire ce travail à la main ou à la machine. L’ouvrage obtenu est plus épais et plus chaud qu’un patchwork simple. Au Canada, cette technique de matelassage est appelée aussi courtepointe. Il ne faut appeler quilt ni les ouvrages faits de deux épaisseurs seulement (sans molleton) ni ceux qui sont noués (car non quiltés au point avant).

Pour les débutantes, il est essentiel de choisir un tissu solide qui se déforme peu. Le coton est tout indiqué. Il faut commencer par des projets constitués de simples carrés : sous-verres, tote bag, housses de coussins, petites couvertures. Le choix est vaste et l’appel à l’imagination sans limite. J’ai hâte de me lancer dans ma couverture de bébé !

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